La peinture à la cire : histoire et usages actuels
Cette semaine, je m’attache à vous parler de la peinture à la cire. Malheureusement, peu usitée, cette technique de peinture offre pourtant de magnifiques rendus et des œuvres empreintes de poésie.
Utilisée depuis l’Antiquité, elle consiste à mélanger des couleurs et un liant, ici la cire d’abeille.
Je vous explique tout sur cette peinture.
Petite histoire de la peinture à la cire
Comme je vous l’ai dit en introduction, la peinture à la cire existe depuis l’Antiquité. Vous le voyez, ce n’est pas une invention récente.
Les portraits funéraires de Fayoum, retrouvés sur des momies et réalisés avec ce procédé, ont été découverts en Égypte. La datation de leur réalisation est peu précise, mais ils auraient été peints vers le IIe ou IIIe siècle apr. J.-C. C’est dire s’ils ont résisté au temps !
L’écrivain et naturaliste Pline l’Ancien, né en 23 apr. J.-C. , parle de la peinture à la cire et de la peinture à l’encaustique dans ses ouvrages.
Il en explique largement la fabrication, en particulier de la cire de Carthage, la plus réputée à cette époque. Elle était utilisée aussi bien par les apothicaires que par les peintres.
La cire d’abeille était alors bouillie dans de l’eau de mer à laquelle était ajouté du nitre. La fleur de cire (blanche) qui remontait à la surface était alors récupérée. On lui ajoutait des pigments afin de créer des cires de différentes couleurs.
Au fil du temps, les techniques ont varié.
C’est Diderot qui en parle à nouveau en 1755 à travers son ouvrage “L’histoire et le secret de la peinture à la cire”. À l’époque de Diderot, au XVIIIe siècle, le processus de saponification est très en vogue.
Ce processus par saponification est toujours usité aujourd’hui.
Philippe Cognée est un artiste très connu pour ses œuvres réalisées à la cire d’abeille. Si vous ne le connaissez pas, je vous conseille d’aller admirer son travail, en particulier la toile “Idole” faite en 2017.
Cire à chaud ou cire à froid ?
Ces 2 cires sont différentes, tant dans leurs fabrications que dans leurs usages.
Cire à chaud ou encaustique
- La cire
Encaustique vient du grec enkaustikos qui signifie : faire brûler, graver par le feu. Elle est généralement composée de cires d’abeilles naturelles mélangées à un oléorésineux tel que la résine Dammar.
- Le matériel
Cette technique nécessite plus de matériel et est plus complexe à utiliser que la cire froide.
En effet, la cire est solide à l’état naturel. Lorsqu’elle est utilisée en peinture, elle doit être chauffée pour devenir liquide et ainsi pouvoir être appliquée, au pinceau par exemple.
L’artiste qui l’utilise devra donc disposer d’une plaque chauffante lui permettant de faire ses mélanges de couleur et permettant également aux cires de rester liquides. La plaque chauffante doit être à une température précise de façon constante. Dans le cas contraire, la cire chauffée revient rapidement à son état solide.
Si une couche de cire est appliquée sur une autre, il faudra alors les faire fusionner à l’aide d’une source de chaleur (un chalumeau ou un décapeur thermique par exemple).
Vous le voyez, cette peinture à l’encaustique demande un peu de matériel.
L’encaustique peut être utilisée seule afin d'obtenir de la transparence ou mélangée à des pigments afin d’obtenir des cires de différents coloris.
Des copeaux de cires solides peuvent également être disposés sur le support. Ils devront alors être fondus avec un fer à repasser disposant d’une semelle sans trous.
Ce procédé peut sembler difficile et fastidieux, mais le résultat obtenu en vaut la peine.
L'œuvre terminée ne ressemble à aucune autre. La cire permet en effet de réaliser des effets de matières, des reliefs et une impression différente de la peinture classique.
Pour cela, vous pouvez utiliser uniquement les pinceaux, uniquement le fer à repasser ou utiliser les deux. Pour les traits fins, la pointe du fer à repasser est parfaite.
Tout est question de préférence.
Vous vous en doutez, pour maîtriser parfaitement cette technique, il vous faudra quelques heures de pratique.
Une fois la toile réalisée, frottez-la avec un chiffon de laine pour la rendre parfaitement brillante et enfin vernissez-la ou laquez-la pour la protéger.
- Comment l’utiliser ?
Utilisez un support rigide et absorbant : un cadre en bois de peuplier est parfait. Une toile en coton pourrait faire craquer la cire durcie.
Scotchez les bords afin de retirer facilement la cire qui aura coulé. Appliquez ensuite du gesso sur toute la surface afin que la cire adhère mieux puis effectuez un léger ponçage.
Avant de commencer à peindre, chauffez délicatement le support (avec un chalumeau) pour que la cire ne fige aussitôt que vous l’aurez posée. Dans ce cas, vous ne parviendrez pas à l’étaler.
À l’aide d’un pinceau, allez chercher les différentes couleurs et peignez. N’oubliez pas de fusionner à l’aide d’une source de chaleur entre chaque couche.
Une fois votre travail terminé, frottez-le avec un chiffon de laine ou grattez-le avec une mirette. La mirette vous permet de mettre à jour les couches du dessous. Choisissez une façon ou une autre en fonction du résultat voulu. Si vous grattez la cire, les copeaux obtenus pourront être réutilisés sur cette toile ou une prochaine. Il vous suffit alors de les disposer sur la toile et de les faire fondre au chalumeau ou au fer à repasser.
- Un petit conseil
Ne l’exposez pas à une source de chaleur importante (au-dessus d’un radiateur par exemple), la cire risquerait de couler !
Par contre, étant hydrophobe, elle résiste très bien à l’eau.
Paul Ranson - L'Egyptienne - Encaustique sur toile - 1891
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Cire froide
- La cire
Elle est aussi connue sous le nom de “cold wax medium”. Elle est constituée, en général, de cire d’abeilles fondue, de solvant et de résine Dammar. La pâte obtenue est dense et permet de réaliser toute une gamme de textures.
Elle peut être mélangée avec du pastel, du fusain, du crayon ou de la peinture à l’huile. Dans ce dernier cas, elle annule la règle d’or de cette peinture : la règle du gras sur maigre. Elle vous permet une plus grande liberté pour peindre. La cire ne fait pas très bon ménage avec la peinture acrylique puisqu’elle est hydrophobe.
Comme son nom l’indique, la peinture froide se travaille à froid et nécessite donc moins de matériel que l’encaustique.
Son point commun avec la cire chaude ? Il est préférable d’utiliser un support rigide comme un cadre en bois. Pour les mêmes raisons de risque de craquelures. Recouvrez-le de gesso avant de peindre.
Vous pouvez également utiliser des “Arches oil paper” : c’est un papier parfait pour ce type de médium.
- Comment l’utiliser ?
Pour la mélanger avec la peinture à l’huile, utiliser 50 % de chaque composant. Si vous procédez par fines couches, diminuez la part de médium pour augmenter celle de peinture à l’huile (environ 70 % de peinture pour 30 % de cire).
- Comment procéder ?
Mélanger simplement votre peinture et votre cire avec un couteau. Appliquez ensuite votre pâte à l’aide de ce même couteau, d’un brayer ou d’un catalyst wedge en travaillant les couleurs et les textures. Vous pouvez parfaitement superposer les couches.
Pour ajouter encore plus de textures, vous pouvez également faire des insertions de sable, de poudre de marbre, de mosaïques…
Une fois terminé, laissez sécher 24h au minimum pour obtenir un fini mat ou frottez avec un chiffon en coton doux pour obtenir un fini brillant.
Vous pouvez réaliser vous-même votre cire froide en mélangeant :- 275 g de cire d’abeilles filtrée
- 25 g de résine Damar en poudre
- 275 g de solvant sans odeur
N’hésitez pas à tester la peinture à la cire, même si son travail semble un peu fastidieux (en particulier pour la cire chaude), le résultat en vaut la peine.
Une autre façon de peindre s’offre à vous !
Bye Bye !
René