Qu'est ce que le flochetage ?

Si, la plupart du temps, la peinture se fait à l’aide de grands aplats, elle est également possible par flochetage.

Cette technique aurait été inventée par Eugène Delacroix, vers la fin de sa vie.

Comme le pointillisme, le flochetage fait partie de ce que certains peintres ont appelé le divisionnisme.

À travers cet article, je vais tenter de vous expliquer cette technique. Qu’est-ce que le flochetage, quels peintres l'utilisaient ? 

Je vous donne également quelques conseils pour le réaliser vous-même.

La lutte de Jacob avec l'Ange - Eugène Delacoix (1861)

 

Définition

 

Définition

Comme je vous l’ai dit en introduction, cette technique particulière aurait été inventée par Delacroix.

Si j’utilise le conditionnel, c’est tout simplement parce que le flochetage aurait également été identifié sur des toiles de Barthélemy d’Eyck, soit 300 ans avant l’invention d’Eugène Delacroix.

Dans un article précédent, je vous ai parlé du pointillisme, qui fait partie du divisionnisme (lui-même né de l'impressionnisme).

Dans le flochetage, ces petits points de peinture sont remplacés par de petites hachures de couleur que l’ont juxtapose afin de réaliser un contraste de couleur et d’effets.

Frédéric Villot, ami de Delacroix décrivait ainsi son art :

« Au lieu de poser la couleur juste à sa place, brillante et pure, il entrelace les teintes, les rompt et, assimilant le pinceau à une navette, cherche à former un tissu dont les fils multicolores se croisent et s'interrompent à chaque instant. Delacroix appelait ce genre d'opération flochetage. »

 

Les peintres et le flochetage

L'œuvre réalisée dans la chapelle des Saints-Anges, par Eugène Delacroix, est une sorte de fresque murale en cire et peinture à l’huile. Pour La lutte de Jacob avec l'Ange, il utilise le flochetage.

Un de ses autres chefs-d'œuvre est Ovide chez les Scythes.

À l’instar du pointillisme, c’est l'œil qui mélange les couleurs et non le pinceau. Lorsque l’on regarde l'œuvre de loin, on ne constate pas d’effets en particulier. Notre cerveau, combiné à notre vision, rend l’ensemble des hachures lisibles dans une unité.

Delacroix était obsédé par le mélange des couleurs. Il en parlait sans cesse à ses contemporains. Il cherche à créer de nouvelles teintes avec celles existantes. C’est dans cette optique de création qu’il débute le flochetage. Si beaucoup estime que Delacroix a peint avec sa technique principalement à la fin de sa vie, il s’avère que ce n’est peut-être pas exactement le cas.

Effectivement, il aurait perfectionné son flochetage lors des 6 mois qu’il a passés à voyager au Maroc et en Algérie dans les années 1830.
Il est impressionné par la beauté des tapis de Perse. 

Grâce au flochetage, Eugène Delacroix élimine les contours noirs habituellement utilisés. Ils sont alors, eux aussi, déterminés par des touches de couleur en virgules plus ou moins droites posées les unes à côté des autres. 

Georges Seurat et Paul Signac s’intéressent à cette méthode. Ils théorisent le divisionnisme qui prend appui sur les théories de Chevreul.  Ce chimiste pense en effet que les couleurs n’ont pas vraiment d’existence propre, mais qu’elles existent par ce qui les entoure. C’est en quelque sorte par le contraste de la couleur qui la jouxte que la teinte devient visible.

Les couleurs agissent comme des illusions d’optique. Si vous peignez du noir autour d’un carré noir, il disparaît. Si vous peignez du blanc autour de ce même carré, il apparaît clairement. Enfin, si vous peignez du gris autour du carré, alors il semble moins noir qu’avec le fond blanc. Tout n’est qu’illusion.

Le postimpressionnisme de Paul Gauguin aurait également utilisé des traits de flochetage. Cette découverte a été faite par des experts en art.

Le flochetage agit comme une pixellisation de l’image. Elle est nettement visible de près, mais disparaît pour laisser place à une image harmonieuse de loin.

Les hachures sont peintes avec des couleurs complémentaires, ainsi chaque teinte renforce les autres.

 

Ovide chez les Scythes - Eugène Delacroix - 1859

 

La technique du flochetage

 

Pour parvenir à retranscrire toutes ses émotions, Delacroix peint de petits traits, de petites hachures ou de petites virgules. 

Pour imager le propos, on pourrait penser aux compresses de gaze. Elles sont en effet formées d’un amas de fils très fins tressés les uns avec les autres.

Pour le flochetage, la technique est un peu similaire, mais les traits ne sont pas peints de manière aussi stricte et régulière.

Delacroix a une appétence particulière pour les sujets historiques et littéraires du XVIe siècle. Il est inspiré par les peintres de la Renaissance et les couleurs vénitiennes.

Toutes ses recherches, ses découvertes et sa peinture ouvrent la voie à la naissance de l’impressionnisme.

Ce qui donne toute sa force au divisionnisme (pointillisme et flochetage) est le fait que celui qui regarde l'œuvre n’est plus seulement spectateur, mais aussi acteur.

Comment peut-il être acteur me direz-vous, puisque le tableau est déjà peint et qu'il ne fait que le regarder ? Et bien non. Le divisionnisme est une sorte d’illusion d’optique. La peinture n’est rien sans les yeux et le cerveau de celui qui regarde.

C’est ici que tout se joue, que les couleurs se mélangent pour prendre tout leur sens.

Sans nos yeux, l'œuvre ne serait qu’un amoncellement de traits colorés. Certes, une magnifique œuvre tout de même. Cela ne signifie pas que le travail de l’artiste n’est rien, bien au contraire. Sans son admirable travail, le spectateur n’a rien à admirer ! 

Artistes et spectateurs se complètent pour donner toute sa magnificence au tableau. 

Les couleurs sont plus intenses, l’ensemble est lumineux.

Zoom sur le flochetage d'Eugène Delacroix

 

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Réalisez votre flochetage

 

Pourquoi ne pas essayer ? 

Pour cela je vous conseille de peindre à partir d’une image, d’une photo prise pendant vos vacances…

Définissez les zones les plus sombres et les plus éclairées ainsi que la densité de hachures à réaliser.

Plus la densité de traits sera élevée, plus la zone sera sombre et plus la réalisation sera longue.

Pour les couleurs, vous pouvez vous contenter des trois couleurs primaires, puisque les nouvelles teintes se feront par la juxtaposition de ces 3 indispensables.

Définissez les grandes formes de l’image que vous souhaitez reproduire. Le travail est long, il vous faudra donc être patient. 

Une fois les grandes lignes restituées, vous pouvez débuter les détails.

N’oubliez pas de prendre régulièrement du recul sur votre toile. Au sens propre : reculez de quelques pas et voyez ce que rendent toutes ses petites hachures. Est-ce conforme à ce que vous vouliez faire ?

Pour un résultat optimal, essayez d’être très régulier, c'est-à-dire de peindre tous les traits avec la même épaisseur et avec le même espacement. Bien évidemment pour les mêmes contrastes puisque vous devrez serrer les hachures pour peindre les scènes plus sombres. 

Les couleurs ne doivent pas se chevaucher, c’est les yeux qui doivent les mélanger, pas votre pinceau. 

Les contours se réalisent également avec cette technique, ne commencez pas votre tableau en esquissant les pourtours avec de fins traits noirs. 

 

 

Vous êtes maintenant incollable sur le flochetage. Vous voyez que cette technique inventée par Eugène Delacroix est née de la volonté de perfectionner le travail des couleurs. 

Elle n’est certes pas la plus répandue chez les peintres de son époque ni de la nôtre, mais elle mérite cependant d’être connue et comprise.

Vous pouvez, vous aussi, l’expérimenter pourquoi pas…

À vos pinceaux !

 

René Milone

René